À partir de plusieurs écrits glanés, voici une brève présentation d’Hildegarde de Bigen, femme du XIIe siècle, d’une grande modernité par son approche et sa compréhension de la nature et de l’homme. Pour la sainte:  – « l’homme est la clôture des merveilles de Dieu, il en finalise la Création et en est le gardien » cela va plus loin qu’un simple corps mû par une âme et cela, va à l’encontre d’autres antispécistes et végan intransigeants pensant à croire que l’homme sera l’ennemi à abattre pour protéger la nature, une nature devant animiste et divinisée, c’est le « retour de Pan » décrit par Stéphane François. En effet, un juste écologie intégrale menant à la sagesse de la modération est à retrouver sans conflit de par une juste interdépendance entre de l’homme et la nature. D’autre part, pour Sainte Hildegarde : – « l’homme est appelé à régner sur la Création en bonne intelligence, et non en dominateur, en exerçant une responsabilité et en recevant du Christ : « les énergies de la vie » et la « plénitude de son humanité ». J’insiste sur la « bonne intelligence » pour tendre à mieux comprendre la nature  et renouer avec le faire soit même en convivialité.

 

L’homme au cœur de la Création et de l’Univers, ressemblant à « l’Homme de Vitruve » de Leonard de Vinci, 400ans plus tôt. Illustration d’Hildegarde de Bingen

 

La vision holistique, proposée par Hildegarde, peut aider l’homme à se retrouver au cœur de la création, quand ce dernier commence à subir dans tout son être – âme, esprit et corps – les avatars de l’eugénisme que sont principalement, le transhumanisme, le gender, la santé reproductive (guidé par l’ONU), l’ingénierie sociale, les nanotechnologies et le « vivant artificiel » convergeant vers une politique de ce fait, malthusienne. Ces faits dénaturent l’homme progressivement jusqu’à le déraciner de sa terre pour le séparer de son identité propre, car l’individu déstructuré devient malléable dans une « société liquide » (concept de Zygmunt Bauman et repris, par Lucien Cerise), qui peut tendre à une « Idiocratie » (concept tiré du film Idiocraty de Mike Judge). Comme le souligne Pierre Dumoulin, biographe de l’abbesse : elle « rappelle en permanence l’interdépendance entre les différents niveaux de l’être ».

Toute l’œuvre d’Hildegarde est une quête d’harmonie. L’homme est constitué de quatre éléments (le feu, l’eau, la terre et l’air) et il a besoin de la nature pour survivre. En effet, consciemment ou inconsciemment, il recherche une harmonie avec la nature.

Hildegarde de Bingen a dit: « Bien que l’homme par les dimensions de son corps, il est immense par les dimensions de son âme ».

Par son approche holistique de la médecine, Hildegarde réunifie la création en passant par le minéral, le végétal, l’animal, jusqu’à l’humain, tout en prenant en compte le désir et l’appel à la joie présents au cœur de l’homme. Ainsi, cette femme issue du Moyen-Âge propose une vision moderne pour notre monde. Toujours selon Pierre Dumoulin : « la sagesse médiévale suggère alors tout simplement de revenir autant que possible à la nature, de tenir compte des saisons, de varier son alimentation et d’éviter les aliments nuisibles à l’organisme, surtout en grande quantité ; elle propose aussi des produits simples et naturels pour équilibrer ses repas, soit à titre préventif, soit en fonction des pathologies déjà actives : épeautre, galanga, pyrèthre, fenouil, dictame, aneth, serpolet, etc. ».

On comprend la pertinence de sa pensée au regard des différentes maladies contemporaines, notamment le cancer et ses multiples causes à travers le monde. En effet, les facteurs déclencheurs de cette maladie sont surtout liés à 40% environ, à l’alimentation, idem pour les modes de vie, tandis que l’hérédité et l’environnement écologique ne représentent que 20% des causes. En conséquence, si nous voulons améliorer notre mode de vie, Hildegarde offre des pistes et éveille nos consciences.

Mais cette amélioration passe aussi par une meilleure connaissance de la nature – qui peut commencer par celle de son jardin – où l’approche permaculturelle permet de découvrir une autre voie dans laquelle chaque élément, au sein de la nature, est repensé. En effet, en permaculture chaque élément remplit plusieurs fonctions et inversement, chaque fonction est remplie par plusieurs éléments, afin de former finalement par la somme des parties, une véritable unité. Les trois piliers de cette approche sont résumés par un soin exigeant du sol, la densification et l’association des cultures.

Hiledgarde de Bingen a dit: « L’humilité maintient tout au sein de l’amour, c’est par elle que Dieu rassemble toutes les vertus et se penche vers la terre ».

Hildegarde donne également une dimension anthropologique à ce cadre permaculturel : elle présente une vision complète de l’homme et de son équilibre au sein d’un milieu naturel. Elle va au-delà des simples aspirations matérielles en donnant des clés permettant une élévation de l’être afin d’entrer dans une réelle harmonie avec une nature vivante. De fait, elle aide aussi l’homme à répondre à son besoin d’enracinement dans un lieu à partir duquel pourra germer, au fil du temps, une puissance de vie semée de ses propres mains.

Plus concrètement et localement, il s’agit de prendre soin de l’homme via son alimentation (des aliments choisis qui purifient et fortifient l’organisme) et par d’autres remèdes, en lien avec la naturopathie et cela, passe par le cadre de sa maison (Oikos => Ecologie => Économie dans la maison). Ainsi, l’avenir de l’humanité passe autant par l’écologie de la personne, déjà enseignée par la sagesse bénédictine d’Hildegarde au Moyen-Âge, que par l’écologie, qui combat la pollution de la planète.

Pour finir, venons-en au fait en citant directement Hildegarde (dans le Scivias) : «  Les herbes et les plantes abondent sur la terre et chacune émet un parfum délicieux, tandis que chaque pierre précieuse dispense son éclat à toutes les autres. La création tout entière aspire à l’affection et à l’amour, elle se tient au service de l’humanité et donne le meilleur d’elle-même généreusement, sans rien attendre en retour ».

 

 


Extraits du Livre des Plantes dans PHYSICA


Physallis (Abutilion)

Rhododendron

Drakontaia (Arum)

Héraklios (Lilium)

La « trinité »  (les trois plantes les plus importantes selon Hildegarde) :

  • L’épeautre pour les céréales, la plus riche au monde qui contient à elle seul 85 nutriments.
  • Le fenouil pour les légumes.
  • Les châtaignes pour les fruits.

Les épices :

  • Les épices de la joie : La cannelle, la noix de muscade, les clous de girofle.
  • Le pyrèthre d’Afrique, le galanga rouge, le psyllium, le poivre, le cumin, le basilic, le gingembre.

Les plantes principales dans l’approche Hildegardienne :

L’absinthe, l’achillée millefeuille (les meilleures compresses stériles pour les plaies purulentes jusqu’à à guérir les blesses internes), l’ail, l’ail des ours, l’aloès, l’aneth, l’aunée, l’armoise, l’arum, la balsamite odorante (Tanacetum balsamita), la benoite, la bétoine, le bouillon blanc, la camomille, la grande camomille, le céleri, le chanvre, le dictame, l’encens, Le fenugrec, le genièvre, la gentiane, le géranium (herbe à robert) (très efficace contre les rhumes en le mélangeant au pyrètre d’Afrique et à la noix de muscade) l’hysope, le laurier, la lavande, la lentille d’eau, le lierre terrestre, la marrube, la menthe aquatique, la menthe crépue (menthe romaine), la menthe poivrée, la menthe Pouliot, la molène, l’origan, l’ortie brûlante (la petite ortie), l’ortie dioïque (la grande ortie), le pavot, le persil, le pélargonium, la piloselle, le pissenlit, le polypode, la pulmonaire, le raifort, la réglisse, la ronce, la rose (ancienne), la rue, la sanicle, la sarriette, la sauge officinale, la sauge sclarée, la saxifrage, la scolopendre, le serpolet, la tanaisie, la tormentille, la violette, le zédoaire.

On constate dans la composition de cette liste: que ce sont surtout des plantes vivaces, rustiques et de sous-bois, plantes indigènes et locaux qui s’adaptent à beaucoup de biotopes naturel, poussant pour beaucoup dans des conditions (terre, eau et exposition) peu exigeantes.

Les arbres considérés comme bons pour l’homme : (cf. Le livre des arbres, dans PHYSICA)

  • Le charme, l’if, le sapin (pas en monoculture), le buis, le cyprès, le châtaignier.

Extrait du ch. V : L’ÉPEAUTRE

« L’épeautre est un excellent grain, de nature chaude, gros et plein de force, et plus doux que les autres grains : à celui qui le mange, il donne une chair de qualité, et fournit du sang de qualité. Il donne un esprit joyeux et met de l’allégresse dans l’esprit de l’homme. […] »

Extrait du ch. XLVII : LA FOUGÈRE

« La fougère est tout à fait chaude et sèche, et contient assez peu de suc. Mais elle a beaucoup de vertus analogues à celles du soleil ; en effet, de même que le soleil illumine ce qui est obscur, de même elle met en fuite les apparitions fantastiques, et c’est pourquoi les esprits malins la détestent. Dans les lieux où elle pousse, le diable exerce rarement ses sortilèges ; là où elle pousse, la foudre le tonnerre et la grêle tombent rarement ; et la grêle tombe rarement dans les champs où elle pousse. […] »

Extrait du ch. CCIX : LA PRIMEVÈRE

« La primevère est chaude et tient toute sa verdeur de l’ardeur du soleil. En effet, certaines plantes tirent leur force essentiellement du soleil, d’autres de la lune. Celle-ci tire ses forces essentiellement du soleil. C’est pourquoi elle apaise la mélancolie dans le cœur de l’homme. […] »

Extrait du ch. LVI : LA MANDRAGORE

« La Mandragore est chaude, et légèrement aqueuse ; elle est née de la terre avec laquelle Adam a été créé ; elle a quelques ressemblances avec l’homme, mais elle reste une plante. À cause de sa ressemblance avec l’homme, la présence et les ruses du diable se font plus sentir en elle que dans les autres. C’est pourquoi, grâce à elle, l’homme obtient l’accomplissement de ses désirs, qu’ils soient bons ou mauvais, comme il l’a fait parfois avec des idoles. Quand on l’arrache du sol, il faut la mettre aussitôt dans une fontaine, pendant un jour et une nuit : ainsi tout le mal et toutes les humeurs mauvaises qui sont en elle se trouvent évacués, si bien qu’elle n’a plus aucune vertu magique ni fantastique. […] La silhouette en forme de mâle donne des médicaments plus énergiques que celle qui a une forme de femelle, car le mâle est plus fort (physionomie) que la femelle. […] »

Hildegarde de Bingen a dit: Dieu a crée l’homme à partir de l’argile terrestre et donné la vie grâce au souffle de l’âme constitué d’eau, de feu et d’air.

La fameuse Mandragore d’Hildegarde


Pour lutter contre la colère et la tristesse


« La colère et la tristesse. Lorsqu’un homme est poussé à la colère ou à la tristesse, qu’il fasse vite chauffer du vin sur le feu, qu’il ajoute un peu d’eau froide : ainsi, la vapeur de la mélancolie qui s’était levée pour le pousser à la colère se trouve apaisée ». [passage 233 dans son livre Les cause et les remèdes (Causae et curae)]

Le vin chaud pour chasser la tristesse et qui peut servir en cas de problèmes ORL : en rajoutant dans son vin en cours de cuisson : 4 pincées de noix de muscade râpée, 10 g de camomille allemande, 10 g de semences de fenouil, 4 rondelles de gingembre et 10 g de romarin. On peut rajouter encore, selon les gouts  2 cuillerées de miel.
Le vin chaud pour chasser la tristesse et qui peut servir en cas de problèmes ORL : en rajoutant dans son vin en cours de cuisson : 4 pincées de noix de muscade râpée, 10 g de camomille allemande, 10 g de semences de fenouil, 4 rondelles de gingembre et 10 g de romarin. On peut rajouter encore, selon les gouts 2 cuillerées de miel.

Les autres ingrédients préconisés par Sainte Hildegarde contre la tristesse :
1. L’épeautre
2. Les graines de psyllium
3. Le pyrèthre d’Afrique
4. Les biscuits de la joie
5. Les amandes douces
6. L’avoine (sauf pour les malades)
7. Le fenouil
8. La sarriette (crue)
9. La réglisse (la plante)
10. L’hysope
11. Le vin chaud coupé d’eau
12. L’arum tacheté (Arum maculatum) : en Élixir (le fameux élixir d’Arum contre la dépression nerveuse.
13. L’Elixir de violette (quand la tristesse est liée à une maladie des poumons)
14. La primevère officinale (en compresse directement sur la peau sur la région du coeur).
15. La rue officinale (manger quelques feuilles de rue crue après les repas).
16. L’élixir de scolopendre (si c’est le foie qui est malade !)

D’autres méthodes et clés, dans ce livre du Dr Wighard Strehlow qui donne des conseils pratiques


 


Bibliographie


 

  • « Physica » de Sainte Hildegarde de Bingen aux Éditions Jérôme Million.
  • « Les causes et les remèdes », de Sainte Hildegarde de Bingen aux Éditions Jérôme Million.
  • « Le livre des œuvres divines », de Sainte Hildegarde de Bingen aux Éditions Jérôme Million.
  • « Hildegarde de Bingen, sa médecine au quotidien », du Dr Wighard Strehlow aux Éditions Trédaniel.
  • « Adieu Tristesse ou comment échapper à la déprime », du Dr Wighard Strehlow aux Éditions Résiac.
  • « La guérison du corps et de l’esprit selon Hildegarde de Bingen », du Dr Wighard Strehlow aux Éditions Dangles.
  • « Hildegarde de Bingen, Prophétesse et docteure pour le troisième millénaire », du Père Pierre Dumoulin aux Éditions des Béatitudes.
  • « Hildegarde de Bingen », de Régine Pernoud aux Éditions du Rocher.
  • « Sainte Hildegarde, la santé entre ciel et terre », de Daniel Maurin aux Éditions Jouvence.
  • « Les « recettes de la joie » avec Sainte Hildegarde », de Jany Fournier-Rosset aux Éditions TÉQUI.
  • « Santé et Sérénité – Recettes de la joie avec Sainte Hildegarde », de Jany Fournier-Rosset aux Éditions TÉQUI.
  • « Les belles plantes de la Bible – De l’humble hysope au cèdre puissant »du Dr David Darom aux Éditions L.L.B.
  • « Les plantes de la Bible et leur symbolique », de Christophe Boureux aux Éditions du Cerf.
  • « Histoire des plantes qui ont changé le monde », de Michèle Bilimoff aux Éditions Albin Michel.

« La beauté sauvera le monde»

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En complément, vous trouverez ici un article synthétique de sœur Barbara.

 

 

Sœur Barbara évoque les pensées profondes d’Hildegarde qui refuse tout dualisme, en constatant que la connaissance de l’homme a hélas disparu avec la vision néoplatonicienne séparant l’âme du corps. C’est ainsi que notre médecine moderne a souvent évolué, en séparant ces deux éléments. Pour Hildegarde, l’esprit de l’être humain ne peut être coupé de l’absolu, c’est-à-dire de l’Esprit divin. Quand on se coupe de ce dernier, il y a alors un risque de donner pour absolues les choses relatives (matérialisme déraisonnable et idolâtrie). Cela marche dans ce sens => l’esprit inspire l’âme qui va alors animer le corps et l’être tout entier sera pénétré de la grâce divine. L’âme (ici, les émotions) et le corps de l’homme occidental sont souvent repus, qu’en est-il de son esprit ?

Quand Hildegarde parle d’harmonie, elle nous parle en fait de « mesure »; ce qui est impressionnant chez cette femme « mère abbesse », de vivre avec deux cotés : un, visionnaire mystique et de l’autre, un coté très pratique par le fait qu’elle fonda plusieurs monastères en conciliant des écrits de théologie, de musique, de médecines, les trois grands livres des visions, et les œuvres mineurs; bref c’est le plus grand écrivain du moyen-age.

Un homme doit veiller à garder toujours cet équilibre entre le monde matériel et spirituel. Plus notre tête est au ciel (le transcendant ou tout autre, au Dieu créateur) plus nous serons stable, ancrés au sol et à la terre; notre rapport à la création, au cosmos (le mot d’Hildegarde) s’en trouvera amélioré et connecté graduellement à l’essentiel (la beauté). L’homme est un veilleur, il veille sur toute chose naturelle selon Hildegarde, parce que la création est un processus dynamique. Enfin, c’est aussi une prophétesse pour notre temps, par l’intuition que l’homme peut courir le risque dans sa course au progrès de bousculer la terre et de lui infliger de telles blessures, que pour se guérir, la nature se verra contrainte de déclencher des catastrophes.

 

 

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